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ancien:jeux:un_oeil

INTRODUCTION

Je suis seul, seul avec cet ordinateur, cette machine, commes ils l'appellent. Pourquoi une “machine” ? Une machine, ça peut être tellement de choses… Machine à coudre, machine à laver, machine à remonter le temps, … Enfin, c'est un ordinateur, quoi. Et ça ferait de moi un cyborg ? Je ne me sens pas différent, pourtant. Mais c'est un jeu, alors imaginons.

CHAPITRE UN

J'imagine que je suis un cyborg. Que me dis-tu, petite machine ? Comment je communique avec toi ? Il n'y a pas d'écran, pas de clavier, pas de souris. Seulement un casque et ces petits boutons sur le côté. Et si j'appuie dessus ? Rien. Le bouton du haut, le bouton du bas. Les deux à la fois, peut-être ? Non. C'est peut-être cassé ? Tant pis, passons à autre chose.

Qu'est-ce qu'ils ont dit déjà ? Ah oui, un jeu dans la ville, explorer l'espace urbain, chercher les espaces enchevêtrés.

Quel blabla ! De toute façon, je dois passer à ma banque, alors profitons-en. De quoi j'ai l'air, avec cet attirail… Après tout, ce n'est qu'un casque, d'autres en ont de plus gros ! Et puis c'est un jeu. Le bruit de la circulation est retransmis dans le casque. Je n'avais jamais remarqué que les voitures faisaient autant de bruit. Le vrombrissement passe juste à côté de mon oreille. Par contre, les sons ne correspondent pas vraiment à la réalité. Parfois, un gros bruit de camion surgit alors que la rue est déserte, parfois c'est une sonnette de vélo alors qu'une voiture arrive…

Voilà le distributeur, j'irai chercher du pain après. Rha, il y a un grésillement, c'est pénible. Ah non, ça vient du casque. Il est vraiment cassé ce truc ! Je retire de l'argent puis je m'éloigne de la banque. Le grésillement s'arrête. J'ai un doute, je fais demi-tour. Dès que je m'approche du distributeur, ça recommence. Ah, ah, ça y est, il y a quelque chose ! Je passe devant le distributeur, ça monte. Je m'éloigne, ça diminue. Une vieille dame qui retire de l'argent me regarde d'un air suspicieux. Je lui fais un sourire, mais elle s'en va rapidement. Qu'est-ce qu'elle croit, que je vais lui voler son sac ? Que les gens sont méfiants ! J'ai un son, et maintenant ? Je lève la tête. Des bâtiments, des immeubles, pas grand chose. Rien ne se passe. Peut-être en entrant dans la banque ? J'approche ma main de la porte. Le bruit augmente ! J'entre vite, ça devient désagréable. je referme la porte derrière moi. Plus rien. Plus de bruit de voiture, plus de grésillemennt. En fait, c'est même bizarre. Ce n'est pas l'ambiance habituel des banques, plutôt feutrée. On dirait qu'il y a comme de l'echo, ou alors… Je fais un pas. Ça résonne. Oui, plutôt comme une église. Les autres clients me regardent distraitement. Je m'approche des dépliants, histoire de faire quelque chose. Je tend l'oreille. Il me semble entendre quelque chose, un murmure, qui vient de ma droite. Je sors discrètement ma machine. Des leds sont allumées ! Depuis combien de temps ? Je n'ai pas fait attention. Je me déplace dans la banque. Rien ne change pour les leds, mais le murmure augmente lorsque je m'approche du guichet. C'est comme une litannie dont je ne distinguerai pas bien les paroles. Je me décide à m'approcher du guichet. Quand vient mon tour, le murmure est juste devant moi, mais je ne peux toujours pas distinguer les paroles, comme si un voile m'en séparait.

- Bonjour ! - Euh, oui, bonjour, c'est pour un retrait. Euh, non, pour connaître l'état de mon compte. - Oui, pouvez-vous me donner votre numéro de compte, s'il vous plaît ? - Attendez, je vais voir si je l'ai. La carte, ça suffit pas ? Mon nom ? Bon, c'est pas grave, merci, au revoir.

Voilà, j'ai juste eu l'air ridicule. Et du coup, je n'ai même pas regardé la machine pendant que j'étais au guichet. Tant pis, je sors, je ne vais pas y retourner. Déjà qu'elle me regarde d'un oeil bizarre. Décidemment, c'est deuxième fois qu'on me prend pour quelqu'un de louche en quelques minutes. Cette fois, je ne quitte pas ma machine des yeux. C'est ça ! Quand je sors de la banque, les leds s'éteignent. Elles font un truc bizarre, et elle s'éteignent.

Que faire maintenant ? Je pourrais aller dans une église, histoire de voir s'il y a un rapport. Il y en a une un peu plus loin. Je marche, donc. Cette fois, je ne quitte pas ma machine des yeux.

CHAPITRE DEUX

Trois mois que je suis entré dans les 5èmes dimensions. Par session d'une heure, de temps en temps, je me balade avec ma machine. Je commence à l'appeler comme ça, moi aussi. Ma machine. J'ai découvert trois ou quatre zones où les leds s'allument, et même une logique qui les animent. Quand je pénètre dans une zone où le son est différent, elles prennent une forme particulière. Quand je suis dans des zones silencieuses, aussi. Et à la limite de ces zones. Des 5èmes dimensions ? Il arrive également qu'elle prennent d'autres formes à des moments que je ne comprend pas. Ou bien qu'elles s'affolent dans tous les sens.

Entre chaque session, je me connecte sur internet, sur un ensemble de sites réservés aux espaces enchevêtrés. Comme tous les joueurs, je peux y laisser des notes, des remarques, et tracer des zones sur une carte de la ville. Je peux également discuter avec d'autres, partager ce que je met sur le site. Ou pas. Je choisis ce que je partage. Souvent des informations sur des zones où il y a déjà d'autres joueurs. Ainsi, ils me permettent d'enrichir ma propre zone, et je garde la plupart de mes informations secrètes.

CHAPITRE TROIS

C'est l'anniversaire de ma première année de jeu. Avec Uissixe, le nom que j'ai donné à ma machine en m'inspirant d'un numéro de série écrit dessus, nous avons arpenté la ville de long en large. J'ai répertorié toutes les zones différentes, ce qui n'a pas été aisé, car certaines zones ont des contours mobiles. Ma carte est pleine d'annotations pour indiquer quand la zone a bougé, et comment. Je ne comprend toujours pas la logique, mais j'accumule les informations. Je vais forcément finir par trouver.

Lorsque les lumières s'agitent, c'est que Uissixe essaye de communiquer avec moi. Je lui répond en appuyant sur les boutons, et ça marche ! Une communication primale, entre mon être virtuel et mon être physique.

Parfois, après avoir échangé avec Uissixe, il me laisse un message sur internet. Un ou plusieurs code lumineux, tracés sur la carte de la ville.

Lorsque je découvre une nouvelle zone, je félicite Uissixe de quelques mots. Mes premières hésitations et la discrétion que je voulais avoir vis-à-vis des autres gens me font sourire, maintenant. Pour tous les autres, je fais des choses étranges. Mais moi, je sais ce que je fais, c'est mon petit secret et toutes ces personnes ne peuvent pas comprendre.

Finalement, les autres sont-ils entièrement humains ? Ils n'ont pas accepté la part de virtuel qui les composent. Le pourrait-il, seulement ? Ils n'ont pas Uissixe, eux, ils n'ont que leur petite personne. Ils pensent utiliser internet, les bornes de la sécurité sociale, le distributeur. Mais qui utilise qui ?

[la personne est focalisée sur le visuel, seule. La découverte n'ira pas très loin.]

ancien/jeux/un_oeil.txt · Dernière modification : 2024/02/09 17:39 de 127.0.0.1